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法语有声小说: Adolescence

vivian-117 2006-09-24 22:33

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Il renoua une fois de plus les lacets détrempés de ses Doc Martens lourdes et usées.

La petite pluie fine n'avait pas cessé de la journée, elle avait peu à peu détrempé son blouson, il sentait le froid le pénétrer.

Il marchait depuis longtemps, depuis des heures. Il aurait pu prendre un train ou un bus, il avait de l'argent. Depuis qu'il avait décidé de partir, il était passé plusieurs fois au distributeur pour faire de petits retraits. Sa mère veillait à ce que son compte soit approvisionné et qu'il ne manquât de rien.

Il avait mille raisons de marcher : tout d'abord, la recherche de son père disparu sans crier gare un matin. Il partait au travail. Il n'était pas rentré. C'était classique. C'était banal. Mais quand ça vous arrivait, c'était irréel et on sentait une froissure, là, quelque part dans la poitrine. Une froissure douloureuse qui perdurait.

On avait attendu le père, au début.

Puis sa mère avait décidé qu'il savait ce qu'il faisait, qu'elle n'avait pas à le surveiller. Mais le petit pensait qu'elle en savait plus qu'elle ne l'avouait, sinon elle aurait averti la police, non ?

Son père avait peut-être une autre vie ailleurs, d'autres enfants… Il n'avait pas encore osé en parler à sa mère.

La pluie fine le transperçait. Ses cheveux mouillés gouttaient sur sa nuque. Quelle chance qu'on ne fût pas en février ! Mais cette fin avril n'était guère plus agréable.

Il porta une main glacée à son nez et essuya rapidement ses narines en reniflant, geste que sa mère détestait.

Il revint à ses pensées.

Oui, il avait mille raisons de partir.

Sa mère, attentionnée, aimante, était devenue trop présente depuis le départ du père. Elle voulait tout régenter, tout organiser, même sa vie à lui.

Aux dernières vacances, elle avait refusé qu'il parte avec la famille de Jérôme, sous prétexte qu'elle ne la connaissait pas assez. Mais c'est lui qui aurait dû partager leur vie, pas elle.

Parfois, elle avait de brusques colères ou de grands éclats de rire qu'il redoutait plus encore.

Il avait dû partir.

On le retrouverait, sans aucun doute, mais il fallait qu'il se prouve qu'il pouvait réussir, lui aussi.

L'Autre était présent, sans cesse présent dans ses pensées. Il voulait tant lui ressembler.

Il avait réussi en partie déjà : au dernier trimestre, il avait eu la meilleure note en latin. Mais c'était insuffisant.

Il plongea brusquement les mains dans les poches de son blouson et en palpa le fond : il était troué. Ses doigts engourdis par le froid sentaient à peine les fins fils dégagés volontairement de la couture. Et il marchait, les deux poings dans ses poches, le front buté, la bouche amère.

"J'aurais dû emmener la pipe de Parrain" songeait-il, lui qui n'avait jamais fumé.

Il marchait à présent au bord de la route. La pluie irisait le bitume souillé d'hydrocarbure.

Il s'arrêtait de temps à autre et regardait la vallée où coule le fleuve. Une brume effilochée montait de la Meuse, se tendait vers les nuages et filtrait l'horizon. Il aimait les collines surtout, leurs courbes arrondies étaient douces sous le vert nuancé du printemps. Il aurait aimé vivre en solitaire, ici, là-bas, quelque part, n'importe où… Mais VIVRE !

Il avait quitté la ville morne où il ne trouvait pas sa place pressentant qu'un grand destin l'attendait ailleurs.

Il marchait dans le vent, la pluie, décidé à en découdre avec cette vie petite bourgeoise qu'il exécrait.

Le froid le ramena à la réalité proche.

Il n'était pas loin de la gare. Il consulta sa montre : bientôt 17 heures.

Il marchait donc depuis 7 heures !

Il entra dans la gare, acheta un billet et, parmi les autres voyageurs, attendit le train pour Charleville.

Plusieurs fois, il crut être reconnu, il crut qu'on allait le reconnaître. Mais personne ne prit garde à ce collégien trempé. Personne ne s'étonna. Il était un parmi tant d'autres.

Le voyage durerait un peu plus de 20 minutes avec les arrêts. Vingt minutes, alors qu'il avait mis 7 heures pour parcourir la même distance !

Bientôt, il serait chez lui. Il prendrait son sac de cours là où il l'avait caché, dans la cave. Sa mère serait rentrée du travail. Une odeur agréable lui rappellerait sa faim, il n'avait grignoté que des gâteaux secs depuis le matin.  Il dirait qu'il s'était attardé chez Jérôme. Elle ne poserait peut-être pas trop de questions. Il ne lui resterait alors qu'à subtiliser la carte d'absence envoyée par le collège.

Il sortit de sa poche une carte postale qu'il contempla longuement, puis il sourit.

"D'accord, tu as été le plus fort, je n'ai pas atteint Paris comme toi" dit-il au jeune garçon boudeur de la carte. "Mais je suis plus jeune que toi et je crois que j'aime ma mère".

Il fixait avec tant d'attention le bout de carton qu'il lui sembla que l'Autre lui souriait aussi, l'Autre dont il portait le prénom, Arthur.

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